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Ma Voix
21 juillet 2004

à Moore et désespoir

Aïe! C'est toujours difficile de critiquer ce qu'on aurait voulu aimer, mais il arrive qu'on ne puisse pas se taire... La chorale française claironne depuis le mois de mai que le film de Michael Moore est un petit chef d'oeuvre, encore gratifié d'une palme, et qui pourra changer la face du monde en novembre (au moment du vote des Américains pour les Présidentielles)... Moi je veux bien, mais il faudrait rétablir une certaine vérité: Farenheit 9/11 est un film de propagande.

On peut ne pas être d'accord avec les actions menées par le petit G.W.B., il est même très difficile d'être d'accord avec lui tant les erreurs commises sont importantes. Il y a d'ailleurs des scènes incroyables, comme cette scène où Georges W. Bush dénonce le terrorisme, puis se retourne et va faire un swing de golf! On croit rêver!! Pour autant, il ne faut pas tomber dans la manipulation d'opinions... Que dire quand on laisse entendre qu'un directeur de chaîne, cousin de G.W.B., a fait l'élection en proclamant les résultats?! Est-ce qu'il faut en conclure que, quels qu'auraient été les résultats des élections de 2000, sa chaîne était obligé de dire que l'adversaire de G.W.B. gagnait, pour ne pas se faire taxer de parti pris?

On parle des Saoudiens, et Michael Moore dénonce le fait que le président Bush est dîné avec l'ambassadeur saoudien quelques jours après le 11 septembre, parce que plusieurs Saoudiens seraient associés aux attentats... Donc, comme plusieurs Saoudiens sont mouillés, ils sont tous coupables? C'est un peu le propos du réalisateur, et ça ressemble à du racisme. Il faut être raisonnable: si des ressortissants d'Arabie Saoudite sont coupables ou menacent, les premiers à pouvoir intervenir sont le Gouvernement saoudien. Il est donc normal de rencontrer l'ambassadeur, pour comprendre, et au besoin mettre la pression sur eux.

Et puis... Et puis il y a la guerre en Irak... C'est proprement lamentable. D'abord, on diabolise la guerre en montrant des enfants qui s'amusent et des femmes qui rient, sous le chant joyeux des oiseaux... images aussitôt suivies de celles de bombardements. Quelle guerre ne fait pas de victime? C'est trop facile de dire, pour s'opposer à une guerre, qu'il y a eu des morts. En Afghanistan aussi il y a eu des morts, et pourtant la guerre était légitime, et pourtant il y a aussi des femmes et des enfants qui riaient, et qui sont morts aujourd'hui. Instrumentaliser la vie pour dénoncer la guerre, c'est innomable. La guerre en Irak n'a été ni pire, ni meilleure que d'autres interventions militaires du même type de ce point de vue-là.

Mais Michael Moore ne s'arrête pas là. Fort de vouloir faire basculer les Américains dans son camp, il utilise la douleur d'une mère qui a perdu son fils en Irak. Et ce sont de longues minutes où on voit les pleurs, la dernière lettre de son fils, un voyage devant la Maison Blanche, et des pleurs, encore et toujours pour le fils disparu... Comment peut-on utiliser la détresse d'une mère qui a perdu son fils?... Que faut-il penser de la douleur de celles qui ont perdu le leur en Afghanistan ou au Kosovo? La douleur n'est elle pas aussi respectable et forte? N'ont-elles pas le droit de dénoncer leur Gouvernement belliqueux?... Evidemment, la réaction du public serait différente, parce que les conflits apparaisaient alors peut-être plus légitimes... Mais il s'agit toujours de parents qui voient leur enfant disparaître. L'illégitimité d'une guerre n'apparaît pas dans les morts qu'elle fait, mais dans la cause qu'elle défend. Ca aurait dû être ça le sujet du film...

Utiliser la passion pour faire changer les gens d'idées, c'est utiliser des procédés fascistes, même si les intentions sont les meilleures. La propagande est l'arme des dictatures, et j'ai vraiment du mal à accepter qu'elle puisse servir à défendre des idées de démocratie. C'est parce que je suis d'accord avec le fond des propos de Michael Moore, que je voulais dénoncer son film.

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