Mon Frère

Ca fait un moment que je n'étais pas venu m'épancher un peu sur mon blog... Il y a des moments où on en a l'envie ou le besoin, et d'autres où on se laisse simplement porter, sans nécessité de raconter... Ca fait quelques jours que je squatte chez Martin, lequel est parti en vacances... C'est quand même adorable de m'avoir laissé son appart. Du coup, je traîne mes guettres près du canal Saint Martin, profite d'une vie de célibataire accomplie, avec ses repas rituels devant la table organisée rien que pour soi, et les soirées dvd passées au fond d'un lit, dans le silence d'un appartement vide. En un mot je respire. Et pourtant, ce n'est pas ce que j'ai envie de raconter...

C'est étrange, les coïncidences... Je lis le blog d'un ami qui parle de son frère, alors même que je voulais intégrer le mien à mon blog. Pourtant, la situation est différente: alors qu'il souffre de la distance que le silence et les difficultés de communication font naître entre eux, de mon côté, je ne peux que m'en féliciter. En fait, je rentre du ciné où j'étais avec mon petit frère. De ma vie, c'est la deuxième fois qu'on va au ciné ensemble! Et la première était il y a seulement quinze jours... On était même en avance pour la séance cette fois, donc je l'ai emmené dans un café que j'adore, près des Halles... C'est la première fois que je prends un verre seul avec mon petit frère...

On a jamais été spécialement bavard, ni lui, ni moi. Bien sûr, comme tout grand frère, je l'adorais quand il était petit... Et même en grandissant, ça a toujours été la personne la plus importante à mes yeux. Mais sans rien dire, sans rien montrer. C'était mon Frère, c'est tout. C'est d'autant plus étrange qu'à dire vrai, ce n'est que mon demi-frère. J'ai le bonheur de participer à cette expérience des années 80 qu'est la famille recomposée, mais ceci dit, je triche un peu: je n'ai jamais connue ma mère qu'avec mon beau-père, et j'ai toujours passé l'essentiel de mon temps avec eux. Tous arguments qui pèsent pour affirmer que c'est mon frère, sans distinction à apporter.

On ne s'est jamais beaucoup parlé, on ne peut même pas dire qu'on aie beaucoup joué ensemble. Et pourtant, sans qu'il ne dise rien, je sens le regard plein d'affection et de respect qu'il porte sur moi. C'est peut-être pour ça qu'après ma mère, c'est la deuxième personne a qui j'ai voulu dire que j'étais homo. Il est pourtant pas vieux, il n'a que 16 ans. Mais c'était important. Et comme on ne se parlait pas beaucoup, je lui ai dit par texto... So bizarre, isn't it? Il n'a pas répondu... jusqu'au lendemain soir, où à un nouveau message, il m'a dit qu'en fait ça lui importait peu. Que sans doute il serait gêné en me voyant embrasser un garçon, mais qu'à part ça, je pouvais faire ce que je voulais... Et de fait, notre complicité naissante n'a pas diminué.

Depuis que je suis parti de chez moi, j'ai appris à me connaître, et à vivre véritablement ma vie. Quand je rentrais chez mes parents, c'était incroyable: au moment des repas, pris en famille comme il se doit, nous étions ensemble, lui et moi, dans une complicité naturelle que nous n'avions pourtant jamais éprouvée, dans un monde que nous étions seuls à habiter, à l'exclusion de nos parents qui nous voyaient nous agiter de réflexions et de rires qu'ils n'avaient jamais entendus aussi nettement, ni de moi, mais encore moins de lui. Notre réserve personnelle, d'un coup, n'avait plus aucun sens puisque nous étions deux. Je crois que notre relation a débuté comme ça, lors ces repas où nous étions comme ligués, donc liés.

Depuis, nos échanges ne se sont pas beaucoup multipliés, et peuvent sembler minimes à beaucoup, mais sont très riches pour nous deux. Le portable a été extraordinaire: quand on est loin de l'autre, on échange quelques messages, sans aucune autre volonté que celle de partager. Je me suis ainsi retrouvé avec un texto, qui n'avait d'autre fin que de me dire qu'il avait vu Farenheit 9/11 en VO alors qu'il était à Cannes chez une amie. Il était en vacances. Et il a été voir un documentaire, un film très politique, en version originale? Comment est-ce que je ne peux pas avoir la sensation qu'il s'agit de mon empreinte, d'autant qu'il vient me le dire! J'étais super fier quand il m'a dit ça, c'est idiot, hein? Mais quand bien même il devait regarder les conneries qui passent à la télé (c'était d'ailleurs un fan de l'émission de Lagaffe!), bah voilà, c'est mon petit frère. On n'a pas vraiment besoin de mots. C'est entre nous.

Les photos sont de Maurizio Sapia.

Comments

[solene]

Bonjour,
Journaliste pour un documentaire, je recherche des familles recomposées qui souhaitent témoigner de leur quotidien (emménagement tous ensemble, premier bébé ensemble, vos bons et plus difficiles moments passés ensemble..)
Si vous êtes intéressés ou si vous connaissez personnes qui peuvent l’être, contactez moi au 01 44 25 02 16 ou sur solene.choplain@yahoo.fr
A très vite, Solène.
PS: Si ce message vous a importuné, veuillez m'en excuser