17 novembre 2004
Constitution européenne - Acte 1
Bon,
je me lance donc dans un décryptage de la Constitution européenne,
puisque les militants socialistes doivent se prononcer dessus dans
quinze jours, et les citoyens français dans un an, mais autant savoir à
l'avance de quoi ça parle! Alors pour le moment, je vais me limiter à
une vision politique, mais la prochaine fois je tâcherai de développer
le fond de ce traité...
Je
suis obligé de commencer par une approche politique, parce qu'on entend
tout et n'importe quoi à propos de ce texte! Alors d'abord, il faut
savoir que c'est pas une constitution en fait! C'est juste "un traité instaurant une Constitution pour l'Europe"...
Ca a l'air idiot, mais ça veut quand même dire que c'est un texte qui
ne vaut pas plus, en soi, que ce qu'on a eu jusque là! Il sera ni plus
dur à appliquer, ni plus difficile à modifier que les traités actuels
(il faudra toujours la ratification de tous les Etats)... La seule
différence, c'est qu'aujourd'hui, l'Europe existe à la fois à cause des
traités de Rome, Maastricht, Amsterdam et Nice. Le nouveau texte doit
tous les remplacer, pour simplifier un peu la donne. Alors on a voulu
parler de constitution simplement pour signifier que c'était un nouveau
départ pour l'Europe, et pour mieux identifier le texte... Du coup, moi
aussi je parlerai de constitution d'ailleurs!
Bon,
alors, ce texte n'est pas non plus la Constitution de Giscard et
Chirac! Quand je vous dis qu'on raconte n'importe quoi! En fait, jamais
un texte pour l'Europe n'a été conçu de manière plus démocratique... Le
but, c'était donc de simplifier tout l'enchevêtrement de textes, toutes
les procédures en place, tous les types de textes qui existent, de
rendre plus efficace le travail de l'Europe, et de tenter de la
rapprocher des citoyens... C'était les trois grands objectifs... Pour
préparer le texte, pour la première fois, on a donc réuni des
représentants de la Commission européenne, des différents
gouvernements, du Parlement européen ainsi que des parlements nationaux
de chaque Etat, qu'il soit membre ou simple candidat à l'intégration
dans l'Union europeéenne. Du coup, il y avait des socialistes, des
chrétiens démocrates, des libéraux, des souverainistes, et tout ce que
l'Europe comptent de courants (un minimum important...). C'est ce qu'on
a appelé la Convention européenne.
Alors évidemment, pour diriger les débats, on a bien dû choisir un président... Et c'est Valéry Giscard d'Estaing qui a été désigné, ancien chef d'Etat français, sous la présidence duquel l'Europe avait pu approfondir son intégration... Pourtant, certains on justement eu peur de la trop grande influence de l'ancien chef d'Etat, et on l'a d'abord assisté de deux vice-présidents, un ancien Président du Conseil italien (Giuliano d'Amato) et un ancien Premier-ministre belge (Jean-Luc Dehaene)... Comme si c'était pas suffisant, en plus de ce presidium, on a mis en place un bureau de 7 personnes supplémentaires, pour que tous les organes présents dans la Convention puissent participer aux principales décisions.
Voilà le Presidium... Alors? Qui est qui?!
Ceci
pour dire que pour le coup, on est loin du débat technocratique, et
plus proche d'un organe de décision démocratique que ce qui avait
prévalu jusque là! Il faut quand même se rappeler qu'auparavant,
c'était de simples conseillers qui préparaient les grands traités, bien
sûr sous la direction des ministres et chefs d'Etat, mais je pense que
tout le monde se rend compte qu'ils avaient autre chose à faire qu'à
discuter d'un traité pendant des mois! Là pour le coup, c'est une
assemblée de toutes les institutions qui a pu débattre...
Personnellement, je trouve que c'est quand même un sacré progrès! Il
faut encore ajouter qu'à l'issue des travaux de la Convention, le texte
qui en est ressorti a été adopté à l'unanimité des membres de la
Conventions... C'est pas rien pour un compromis qui a réuni plusieurs
représentants de 28 Etats d'Europe...
Et ils sont tous venus signer le Traité!
Néanmoins,
les Gouvernements veulent toujours protéger leur petit pouvoir. Ils ont
donc renégocié ce texte, et adopté quelques amendements qui, il faut
l'avouer, en ont un peu amoindri la portée... Au bout du compte, c'est
quand même un nouveau texte fondateur, qui a repris les dispositions
anciennes concernant la politique de l'Union européenne (donc pour ceux
qui protestent contre le contenu de la politique qui sera menée, avec
ou sans la Constitution, les cadres d'actions resteront les mêmes!).
Pour ce qui est de savoir ce qui s'est passé pendant la Convention (puisque aujourd'hui, son travail est achevé biensûr), il faut encore ajouter que chacun a pu suivre les débats qui ont eu lieu... Non seulement une part importante des débats a eu lieu en public dans l'enceinte du Parlement européen à Bruxelles, mais encore, un site internet a été mis en place qui rassemble, encore maintenant, les différents débats qui ont eu lieu, des résumés de chaque décision dans chacun des domaines, les textes de tous les apports émanant d'organes ou de personnalités extérieures à la Convention (comme une Convention des jeunes en Europe, la Banque centrale européenne, le Conseil de l'Europe, ou différentes personnalités politiques). Tout est toujours disponible, pour ceux qui auraient l'impression que tout s'est déroulé en catimini!
Comme tout Traité, pour entrer en vigueur, il doit être adopté par chaque Etat, ce qui implique la signature par les Chefs d'Etat et de Gouvernement (qui a eu lieu à Rome il y a quelques semaines), puis la ratification. En France, cela exige d'abord un vote du Parlement (l'Assemblée Nationale d'une part, et le Sénat d'autre part) pour adopter ce texte, puis soit la réunion du Parlement en congrès (donc les deux assemblées rassemblées) pour voter à nouveau, soit la convocation d'un referendum pour que les citoyens tranchent. C'est cette dernière solution qui a été choisie, afin que les Français puisse choisir d'adhérer à l'Europe qui se construit, ou non. Ca ne veut pas dire voter pour Chirac, Raffarin, Sarkozy ou Hollande évidemment: le texte doit s'appliquer quelque soit le Gouvernement en place, même si, admettons, Chevènement ou Pasqua (pour prendre des gens réticents l'intégration européenne) devaient arriver au pouvoir (ok, c'est très irréaliste comme hypothèse!).
En
bref, dans cette histoire, il ne s'agit pas de voter pour quelqu'un,
quel qu'il soit. Franchement, pour parler du PS puisque c'est lui qui
en débat actuellement, je n'ai toujours pas pu entendre les arguments
des uns et des autres, sinon des présages de malheurs dans l'hypothèse
où les militants ne voteraient pas conformément à l'idée que chaque
camp en a... On peut penser que les médias simplifient le débat, c'est
très possible, mais même les interviews que j'ai pu lire ou entendre,
des uns ou des autres, étaient des plus creuses! Alors de fait, je
pense que c'est à chacun de se forger une opinion personnelle...
Il va s'agir de voter pour un texte, un traité, pour savoir si oui ou non il peut être plus efficace que ce qui existe, et savoir si oui ou non il peut améliorer l'Europe dans laquelle nous évoluons déjà. C'est dire à quel point le fond de ce texte est important, plus que tous les aspects politiciens que certains mettent en avant... Et c'est ce que j'essaierai de développer la prochaine fois!
Constitution européenne, Acte I, Acte II, Acte III
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