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Ma Voix
24 novembre 2004

Constitution européenne - Acte 2

   
Bon, je reste dans mon explication de la Constitution européenne?... Devant l'enthousiasme débordant de tout le monde, je me lance... L'actualité aidant, je vais essayer d'expliquer un peu l'équilibre des pouvoirs en Europe, et les modifications que veut apporter la Constitution.


J'avais parlé il y a quelques semaines des difficultés de mise en place de la nouvelle Commission européenne. En fait, devant l'opposition tenace du Parlement, le nouveau Président de la Commission, le Portugais José Manuel Durão Barroso, a décidé de retirer son équipe pour la remanier. Le commissaire italien aux propos douteux ainsi que la commissaire lettone à la probité discutée ont été remerciés avant même d'être élus, et remplacés. Le commissaire hongrois qui avait fait preuve de peu de compétences devant les questions du Parlement a changé de porte-feuilles et doit s'occuper désormais des questions douanières. Cette Commission remaniée a minima sous la pression du Parlement européen et avec toute la mauvaise volonté des gouvernements aura finalement reçu l'investiture des eurodéputés la semaine passée.

Il s'en est fallu de peu!

Les institutions européennes travaillent en effet à trois, avec la Commission, le Conseil (donc les gouvernements) et le Parlement. Un couple est déjà difficile à tenir, alors faut imaginer la difficulté à trois, quand en plus il s'agit d'institutions collégiales! Mais ça a quand même marché pendant presque 50 ans, donc le principal souci de la Convention européenne était de maintenir cet équilibre, tout en nettoyant les institutions, voire en les rendant plus efficaces... Pour vous résumer le résultat en bref, la Commission sera à terme réduite, le Conseil aura un président stable et un ministre des affaires étrangères, et la voix du Parlement sera plus forte...

La Commission, qui représente l'intérêt de l'Europe, et non celui des 25 Etats différents, a pu conserver son pouvoir exclusif d'initiative. Cela garantit en fait que l'Europe agit toujours dans l'intérêt de tous les Etats (dont les sensibilités sont défendues par chaque commissaire) et non des gouvernements les plus puissants... Pour ce qui est de sa composition, avant le Traité de Nice, les grands Etats avaient deux commissaires, et les autres un seul. Désormais, tous les Etats sont représentés à égalité, aussi bien les petits comme Malte que les grands tels que l'Allemagne. Ca, c'est donc la situation aujourd'hui. Mais certains ont craint que le trop grand nombre de commissaires n'empêche la Commission d'être efficace (chaque décision étant prise à 25, ou pour le moins discutée à 25...). Comme les petits pays ont eu peur d'être écartés, finalement, les 25 commissaires seront conservés... jusqu'en 2014! Après quoi, il y aura un système de rotation égalitaire (dont les détails sont inconnus!)... Je dois bien avouer que personnellement ça me choque un peu, dans la mesure où la Commission doit représenter toutes les sensibilités d'Europe... Quel projet d'agriculture peut se faire sans que la France ne s'exprime à la Commission, ou le Luxembourg dans le domaine bancaire? C'est vrai qu'ensuite les gouvernements s'exprimeront, mais justement, eux continueront à travailler à 25! Alors pourquoi pas la Commission?...

ancien siège de la Commission...
et son siège définitif (autant pour moi, je m'incline, merci!)

Le Conseil, c'est-à-dire les gouvernements, évoluent peu. La modification la plus symbolique est l'élection d'un président pour deux ans et demi, soit la moitié du mandat de la Commission, qui ne pourra avoir aucun autre mandat national, mais qui sera, en anglais, un chairman: en fait, son rôle consiste uniquement à organiser les débats et les réunions, sans autorité particulière... Comme un roi auquel on aurait coupé la tête?... Il s'agit en fait de ne pas concurrencer le Président de la Commission qui doit rester le symbole de l'Europe... Deux autorités au sein de l'Union européenne, ça aurait été importé la cohabitation à la française au sein de l'Union... Et si en France, on a su gérer, au niveau européen, il y a des doutes! Dans le même ordre d'idée, il faut noter une innovation en matières d'affaires étrangères... Aujourd'hui, il y a deux concurrents: d'une part un commissaire aux relations extérieures, et d'autre part un représentant des gouvernements pour la politique extérieure. La grande nouvelle serait de rassembler les deux postes pour faire un Ministre des affaires étrangères, qui serait à la fois membre de la Commission et qui s'occuperait de la coordination des politiques étrangères des gouvernements... Alors on sait pas vraiment si ce sera efficace, mais ce qui est certain, c'est que ça ne peut pas être pire qu'aujourd'hui!... Et surtout, on peut penser que ça évitera une vaine concurrence entre les deux institutions...

siège du Conseil

Last but not least, le Parlement sort renforcé du débat de la Convention: pour la grande majorité des décisions, son avis sera nécessairement pris en compte pour les politiques de l'union. En fait, ça fonctionnera un peu comme en France où l'Assemblée nationale et le Sénat votent les lois, sauf qu'au sein de l'Union européenne, ce seront les gouvernements et le Parlement européen, et ils devront nécessairement se mettre d'accord pour faire avancer la politique européenne. Alors bien sûr, il reste de quelques domaines où l'avis du Parlement ne comptera pas autant, mais c'est un minimum, ceux où certains Etats tenaient à garder la main, mais dans le projet de Constitution, le rôle du Parlement est quand même considérablement renforcé...

siège du Parlement
PS: je sais pas si je suis toujours super clair, donc si ça va pas, hésitez pas à le dire, vous êtes sûrement pas le seul, et je modifierais en conséquence!


Constitution européenne: Acte I, Acte II, Acte III
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Commentaires
C
Le problème avec la nouvelle Commission selon le Traité de Nice, ce n'est pas le fait que tous les pays n'ait qu'un Commissaire mais que le Président ne puissent pas choisir qui il veut désigner pour devenir membre de la Commission. En effet, ce sont les gouvernements des Etats-membres qui désignent LEUR candidat.<br /> <br /> Ce qui est important, ce n'est pas la nationalité mais l'orientation politique !<br /> En l'occurence, que Neelie KROES soit Néerlandaise me laisse de glace. Par contre qu'elle ait été membre de plus d'une trentaine de conseils d'administration alors qu'elle est maintenant en charge de la Concurrence (c'est-à-dire d'assurer l'égalité de traitement entre les entreprises au sein du Marché intérieur)... là ça m'énerve fortement.
C
Erreur pour le siège de la Commission. Sur la photo sur ton jouel, il s'agit du Breydel. Or, depuis quelques semaines, la Commission a retrouvé son ancien bâtiment : le Berlaymont.<br /> <br /> Pour ce qui est de la confusion des pouvoirs, malheureusement, il semble qu'aucun Etat-membre n'ait voulu aller contre avec suffisamment de détermination pour que les citoyens y retrouvent un peu de clarté.
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